La fabuleuse histoire de la CUISINE FRANÇAISE (suite)


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Le Mesnagier de Paris:

En 1393, un Parisien rédige un traité d’économie domestique à l’usage de sa jeune épouse. C’est »Le Mesnagier de Paris » qui nous offre un passionnant aperçu de la vie quotidienne de la classe aisée à cette époque.

Qui est l’auteur de ce livre ? Un bourgeois très riche, du moins très à l’aise. Il explique qu’il a épousé sur le tard une jeune fille de quinze ans, de meilleure maison que lui, d’une autre province et orpheline.

A l’entendre, elle aurait prié son mari de la reprendre quand elle commettait des fautes et même  de la châtier, s’il lui plaisait, mais discrètement, sans témoin, au jour le jour. Le bourgeois estime qu’il vaut mieux prévenir les erreurs de son épouse et prend la plume en affirmant que le Mesnagier sera utile à sa jeune femme, mais aussi à ses filles, à ses amis, voire à son second époux, s’il lui arrivait de se remarier après son propre décès.

Repas médiéval

Notre bourgeois est un gourmand, sinon un gourmet. Les considérations culinaires tiennent dans son livre autant de place que les conseils moraux. Sa femme « devra ordonner dîners et soupers, mets et assiettes »; elle connaitra le fait du boucher et du marchand de volailles ; elle s’entendra dans le choix des épices. Elle devra commander, ordonner diviser et faire toutes manières de potages, civets, sauces et toutes autres viandes.

Il explique encore :

« Primo, comme vous aurez à envoyer Maître Jean aux boucheries, voici les noms de toutes les boucheries de Paris avec le débit de viande qui s’y fait.

Repas quotidien

Boccace  » Le Décameron

A la porte de Paris ( emplacement actuel de la place du Châtelet ), il y a dix-neuf  bouchers. Suivant l’estimation commune à eux tous, ils vendent, par semaine, l’un dans l’autre et la forte saison compensant la faible, 1900 moutons, 400 bœufs et 200 veaux…

…Total des boucheries de Paris, par semaine, sans compter le fait du Roi et de la Reine et d’autres seigneurs de France : 3080 moutons, 514 bœufs, 306 veaux, 600 porcs. Et le vendredi saint sont vendues de 2000 à 3000 pièces de lard.

 » S’ensuivent ci-après plusieurs menus de dîners et soupers de grands seigneurs et autres; à leur lecture, notez-le, vous pourrez aviser, recueillir et apprendre quels mets il vous plaira de servir, selon les saisons et les denrées qui seront dans le pays, quand vous donnerez à dîner ou à souper.

Entremès

Barthelémy l’Anglais

Dîner pour jour avec viande, composé de trente et un mets en six services :

Premier service : viande grenache et rôties, pâtés de veau, pâté de primpreneaux ( espèce d’anguille) ; boudins et saucisses.

Second service : Civet de lièvre avec les côtelettes, purée de pois, viande salée et grosse viande, une soringue d’anguilles et un autre poisson.

Troisième service : rôtis, lapins, perdrix, châpons, etc… luz (variété de brochet), bars, carpes et un potage à quatre couleurs.

Quatrième service : oiseaux de rivière à la dodine (sauce faite de lait aux jaunes d’oeufs et aux épices), riz engoulé ( cuit avec du bouillon de poule ou du lait d’amandes), bouerrée à la sauce chaude (espèce de poisson) et anguilles renversées.

Cinquième service : pâtés d’alouettes, rissoles, lait lardé ( galettes frites de lait caillé au lard et aux œufs battus), flans sucrés.

Sixième service : poires et dragées, nèfles et noix pelées. Hypocras (vin tonique et aromatisé) et le métier (gaufres fines aux jaunes d’oeufs).

Janvier, détail, Très Riches Heures de Jean de Berry

Dîner de poisson pour le carême :

Premier mets : pommes cuites, grosses figues de Provence rôties avec feuilles de laurier sur le dessus, le cresson et le soret (harengs saurs) au vinaigre, purée de pois, anguilles salées, harengs blancs, gravé( sorte de potage destiné à accompagner une friture ou une grillade) sur friture de mer et d’eau douce.

Second mets : carpes, luz, soles,rougets, saumons,anguilles renversées à la boue (sauce épaisse au pain brulé) et une arboulâtre ( mets aux fines herbes, faite d’une farce, d’omelette, de hachis ).

Troisième mets: primpreneaux rôtis, merlans frits, marsoin poudré à l’eau et fromentée ( bouillie de farine de froment aux œufs), crêpes et pâtés norrois ( pâté de foie de morue).

Issue : figues et raisins, hypocras et le métier, comme il est dit plus haut.

Le repas dans la chambre

Les éléments de chaque mets ou service sont souvent rassemblés en pyramide sur un seul plat. Les sauces sont servies à part. Il est rare cependant que les bourgeois fassent pareil festin. Ni leur cuisine, ni leur matériel, ni leur domesticité ne le leur permettent habituellement. Lorsqu’ils doivent recevoir fastueusement, ils louent le matériel et engagent ce que nous nommons aujourd’hui des »extras ».

Au contraire, »Le Mesnagier » nous prouve combien le riche bourgeois qui l’écrit est »regardant » et combien il exige de son « dépensier », c’est à dire son intendant, de vertu d’économie. Ainsi indique-t-il à quel prix et où se procurer et acheter les fournitures.

Le marchand d’épices

Artiste du Cachemire 1850

« Au boulanger , dix douzaines de pains blancs plats, cuits de la veille, d’un denier pièce. Pain de tranchoirs : trois douzaines d’un demi-pied de large et de quatre doigts de haut cuits quatre jours avant et que ce soit du pain bis, ou bien prendre aux halles du pain de Corbeil.

Echansonnerie : trois espèces de vins.

Au boucher : une moitié de mouton pour faire la soupe des compagnons et un quartier de lard pour larder ; le gros os d’une jambe de bœuf pour cuire avec les chapons, afin d’avoir le bouillon qui sert à faire le blanc-manger. Un quartier de veau de devant pour servir au blanc-manger.  pour le second service une jambe de veau de derrière ou des pieds de veau, ce qui fournira le jus pour la gelée.

Venaison : un pied carré.

Repas et bains

Le livre de Valère Maxime

Au marchand d’oublies, il faut commander, primo, pour le service de la jeune mariée, une douzaine et demie de gros bâtons, à six sous; une douzaine et demie de portes ( sortes d’oublies), dix-huit deniers ; une douzaine et demie d’étriers (autres sortes d’oublies), dix-huit deniers; un cent de galettes sucrées, huit deniers.

Au marchand de volaille : vingt châpons à deux sous parisis la pièce ; cinq chevreaux, quatre sous parisis ; vingt oisons, trois sous parisis pièce; cinquante poussins, douze deniers parisis pièce à savoir quarante à rôtir pour le dîner, cinq pour la gelée et cinq à faire la froide sauge pour le souper; cinquante lapereaux, savoir quarante pour le dîner, qui seront en pot et dix pour la gelée, à douze deniers parisis chacun. Un cochon maigre pour la gelée, quatre sous parisis, douze paires de pigeons pour le souper, dix deniers la paire.

Aux halles : pain pour tranchoir, trois douzaines. Grenades pour le blanc-manger, trois , oranges, cinquante. Six fromages nouveaux et un vieux, et trois cent d’œufs. Il est à savoir que chaque fromage doit fournir six tartelettes et qu’il faut trois œufs pour un fromage…

Suit une longue énumération d’autres directives aboutissant à cette conclusion:

« Le total de cette épicerie monta à douze francs, compte tenu de ce qui fut brûlé des torches, et de ce qu’il resta peu d’épices ; ainsi peut-on prendre pour base un demi-franc par écuelle ».

Le « Mesnagier » contient encore de nombreux conseils culinaires, Ainsi, y apprend-on :

« Pour éviter que le potage n’attache, on doit le remuer au fond du pot et veiller que les tisons ne touchent pas au fond et s’il a commencé à attacher, on doit aussitôt le changer de pot. Dans les potages, on doit mettre les épices broyées très fin, sans les passer, et le plus tard possible. C’est le contraire pour les sauces et dans la gelée.

Pour les pièces de viande fraîche, il semble qu’on doive, sans les faire bouillir, les mettre en eau bouillante ; on les retire vite et on les larde tout au long ; puis on les fait bouillir dans l’eau ; on appelle ce potage: bouilli lardé aux épices et aux soupes.

Tous les abats, excepté le foie, sont pour la curée des chiens et on l’appelle le hu… »

( à suivre…)

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