Écrivains gastronomes


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Les cuisines du Café Riche en 1865

Dans le monde parisien sous le règne de Louis-Philippe et de Napoléon III, le docteur Véron tient une place considérable ; médecin, publiciste, fondateur de revues, directeur de journal, administrateur de l’Opéra, mémorialiste, boulevardier et gastronome, il sert de cible à tous les caricaturistes de l’époque, Daumier en tête. Connaissant l’influence d’un bon repas, pris en agréable compagnie, il se sert avec adresse de ce moyen de séduction ; ses soupers au Café de Paris lui valent d’avantageuses relations. Par la suite, il reçoit chez lui rue Taitbout, puis rue de Rivoli ou dans ce magnifique domaine d’Auteuil, la Tuilerie qui a été la résidence de Grimod de la Reynière et de Talleyrand. Sa gouvernante que tout le monde appelle Sophie, bien que son nom véritable soit Victoire Catherine Delalande, gouverne aussi aux fourneaux. Elle a servi chez la danseuse Fanny Essler qui la « donna » au docteur Véron pour le remercier d’un service délicat qu’il lui avait rendu. Elle y demeure 35 ans. Complètement illettrée, cette Normande toujours habillée de noir, ne voudra jamais abandonner son bonnet de paysanne ; mais c’est elle qui aide son maître à s’habiller et veille à la garde robe ; ne supportant pas le moindre valet, c’est elle qui ouvre la porte et reçoit ou renvoie, à sa guise ceux qui se présentent. En effet, chaque soir, la table est dressée pour douze couverts. S’il se présente un treizième convive, il doit s’esquiver, à moins que le maître de maison ne lui cède sa place et s’en aille dîner au Café de Paris ! A part le vendredi où il faut être spécialement prié, on est invité une fois pour toutes lorsque Véron a dit :

« Vous savez qu’on dîne toujours chez moi à sept heures précises « .

Le beau sexe n’est pas exclu ; on voit à cette table trôner des artistes, des comédiennes, mais pas plus d’une fois et cet honneur est fort recherché. Seule Rachel, la Grande, fait longtemps figure de maîtresse de maison. Le Prince Président figure souvent parmi les convives du vendredi. Parmi les intimes, Sophie a ses têtes : son préféré est Sainte Beuve parce qu’il s’amuse à l’inviter… au restaurant, mais elle ne lui pardonne pas d’être nommé sénateur alors que « son » Monsieur n’y parvient pas.

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Les cuisines du Petit Ramponneau en 1865

Le docteur Véron est le premier à découper les romans en feuilleton : il est l’inventeur de la fameuse formule  » la suite au prochain numéro « .

Secondé par le talent culinaire de Sophie, le docteur Véron est un des amphitryons les plus prodigues qui fut. Il est vrai qu’il est très riche grâce à une spécialité pharmaceutique,  » la pâte pectorale Regnauld « , dont il a acheté la formule à un camarade de faculté et qu’il a su lancer d’une manière très moderne. Il est en effet le premier à avoir eu l’idée d’appliquer la publicité à autre chose qu’aux livres. Ce fut un succès considérable. Il meurt cependant malheureux :  » Le Constitutionnel « , journal qu’il dirige, lui vaut sa disgrâce et les convives se font rares. Le docteur Véron reprend alors ses habitudes au café de Paris. Après sa mort, on disperse aux enchères sa cave : c’est une déception. Elle ne contient ni crûs fameux ni vieux flacons : le docteur Véron avait l’habitude d’acheter ses vins au panier chez un restaurateur et quelques bouteilles qu’il avait en réserve ont depuis longtemps fait les délices de ses intimes fidèles. Quelques années plus tard, les anciens convives des dîners de Véron reçoivent un carton en tout point semblable à ceux dont il usait pour les inviter à sa table. C’est Sophie, comblée de gloire, et riche d’années et d’embonpoint, qui les convie au Père Lachaise où l’on exhume le défunt pour le changer d’emplacement.

à suivre …

 

Source : la fabuleuse histoire de la cuisine française d’Henriette Parienté et Geneviève de Ternant. Editions ODIL

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